Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Droit civil: L'Objet et la Cause

Article 1108 du code civil: « un objet certain qui forme la matière de l'engagement » et « une cause licite dans l'obligation » sont essentiels à la validité de la convention. 

 

 

I. L'OBJET

L'objet est envisagé aux articles 1108 alinéa 4 et 1126 et suivants du code civil. Ces articles visent à la fois l'objet du contrat et l'objet de l'obligation.

→ doctrine: terme exact « objet de l'obligation », « objet du contrat » est un raccourci. 

La notion d'objet définie ce à quoi est tenu le débiteur. C'est la réponse à la question: « qu'est ce qui dû? »

 

  • Dans le contrat synallagmatique deux objets sont nécessaires:

    Exemple:

    - obligation du vendeur: livraison de la chose

    - obligation de l'acheteur: paiement du prix

  • Dans le contrat unilatéral, un seul objet est nécessaire

 

→ Les caractères de l'objet: A peine de nullité du contrat, l'objet doit présenter trois caractères: il doit exister, être déterminé et licite.

  • Existence de l'objet: L'article 1108 du code civil vise un objet certain formant la matière de l'engagement. Son inexistence totale est un vice exceptionnel, car sa gravité et son évidence empêchent le plus souvent la formation même de la convention.

    L'objet doit exister au jour de l'exécution de la convention et être possible.

    • Existence de l'objet au moment de l'exécution de la convention: Si l'objet doit exister, il n'est pas nécessaire qu'il présente ce caractère au jour de la formation du contrat. Il suffit qu'il existe au plus tard, lors de son exécution. 

      Selon l'article 1130 alinéa 1 du code civil: « les choses futures peuvent être l'objet d'une obligation »

      Difficulté: Lorsque la chose n'existe pas au jour de l'exécution: une distinction doit être opérée au regard de l'intention des parties:

      • Si celles-ci avaient accepté un aléa quant à l'existence future de la chose: aucune sanction n'est envisageable. 

        Exemple: l'achat du coup de filet du pêcheur → risque accepté par les parties: une partie ne peut rien ramener de la pêche. 

      • Si les parties tenaient pour acquise l'existence future de l'objet: des sanctions peuvent être envisagées selon les causes de l'inexécution (caducité, responsabilité, théorie des risques etc). 

Exceptions: La validité pourtant sur une chose future connait certaines exceptions.

Exemple: article 1130 alinéa 2 du code civil → prohibe le pacte sur succession future, convention dont l'objet est une succession non encore ouverte. Le code civil implique un répréhensible voctum mortis (souhait de la mort d'autrui). Cette interdiction connait toutefois certaines exceptions dans le cas des donations partagés. 

 

  • La possibilité de l'objet: « à l'impossible, nul n'est tenu » → le contrat ne peut être valable si son objet ne peut matériellement exister. Vice rare dans la pratique. 

    Exemples:

    • agence de tourisme promettant un voyage au centre de la Terre

    • accord portant sur la livraison de marchandises interdites à l'exportation

    • accord portant sur l'acquisition d'action réservées à certains acheteur. 

      → La nullité du contrat n'est cependant prononcée que si l'impossibilité est absolue. Si celle – ci tient seulement à l'inaptitude du débiteur, qui a promis une chose qu'il ne pouvait réaliser mais qui aurait pu l'être par un autre, seule la responsabilité du contractant fautif peut être engagée. 

 

  • Détermination de l'objet: Pour que le contrat soit valableil faut que le contractant sache à quoi il s'engage. La détermination de l'objet est donc une condition essentielle, une « nécessité structurelle du contrat ».

    Règle générale: Article 1129 du code civil: « il faut que l'obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce. La quotité de la chose peut être incertaine pourvu qu'elle puisse être déterminée ». L'objet doit donc être déterminée, ou déterminable, l'exigence paraissant s'appliquer à toute obligation qu'elle qu'en soit sa nature.

    Prestation humaine: Si l'obligation a pour objet une activité humaine, la jurisprudence est venue préciser que l'engagement de « faire un geste » en faveur d'un débiteur était nul pour indétermination de son objet: Com. 28 février 1983.

    Mais cette exigence concerne principalement les obligations ayant pour objet une chose, bien qu'une différence doive être faite selon sa nature. 

    Corps certain: La seule exigence est que la chose soit individualisée. 

    Exemple: pour une voiture → tel modèle, telle année. 

    Chose de genre: La chose doit être déterminée dans son espèce, comme dans sa quotité, et le cas échéant, sa qualité. 

    Exemple: Lors d'une vente, i doit être précisé que son objet est du vin, pour tant de litres, et de tel cru. 

    Cette exigence est parfois assouplie. Pour la qualité de la chose, l'article 1246 du code civil dispose qu'à défaut de stipulations contractuelles, il convient d'en donner une qualité moyenne. Quant à la quantité, elle peut être seulement déterminable par référence à la volonté des parties ou aux usages. Mais il faut que les critères de détermination soient suffisamment explicites pour ne pas nécessiter un nouvel accord des contractants au jour de l'exécution, ou ne pas l'aider l'identification de la chose à l'arbitraire de l'un d'entre eux: Civ. 1Er, 23 mai 1995.

     

    Cas particulier du prix du contrat: Difficulté particulière pour les contrats dont l'une des obligations a un objet monétaire, c'est à dire les contrats à titre onéreux. 

    La détermination de l'objet au prix est nécessaire à la validité de l'exécution de la convention. Le prix ne pouvant être fixé par le juge, il doit être déterminé ou déterminable selon des critères objectifs. 

    La règle connait une exception pour les contrats ayant pour objet une activité humaine, tels que les contrats de louage d'ouvrage ou de service. Devant l'impossibilité de déterminer par avance l'étendue des moyens mis en oeuvre, la jurisprudence considère que la détermination du prix lors de la formation du contrat n'est pas une exigence de sa validité. Les parties peuvent s'accorder après l'exécution de la prestation. Si aucun accord ne peut être trouvé, le prix est alors fixé par le juge: Civ., 3ème, 24 janvier 1978.

     

    Pour les contrats de distribution: un contrat cadre conclu entre un commerçant et un producteur. Le commerçant s'engage à s'approvisionner auprès du fabricant pendant une certaine période, à des prix déterminés par les tarifs de ce dernier. En contrepartie, le producteur lui assure divers avantages: aide à l'installation sous forme de prêt ou de garantie bancaire, assistance commerciale etc. En exécution de cette relation, des contrats d'application sont conclus, par lesquels le commerçant se fournit auprès du fabricant. 

    Exemple: contrat de franchise, contrats dits « de bière ». 

    En 1995, la cour de cassation est venue préciser que « l'article 1129 n'était pas applicable à la détermination du prix ». Elle considéra que « la clause d'un contrat... faisant référence au tarif en vigueur au jour des commandes d'approvisionnement à intervenir n'affecte pas la validité du contrat, l'abus dans la fixation du prix ne donnait lieu qu'à résiliation ou indemnisation ». 

 

  • Licéité de l'objet: La volonté des parties n'étant pas sa limites dans le domaine contractuel, ces dernières ne peuvent conclure un contrat ayant un objet illicite. 

    L'objet doit être dans le commerce et conforme à l'ordre public et aux bonnes moeurs pour être licite.

    • L'objet doit être dans le commerce: L'article 1128 du code civil dispose qu'« il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet des conventions »

      Interdiction des contrats portant sur le corps humain: Avant les lois du 29 juillet 1994 dites bioéthiques, la jurisprudence avait fondé la nullité des conventions portant sur le corps humain sur l'article 1128 du code civil. 

      Assemblée plénière 31 mai 1991: nullité des conventions de mères porteuses. 

      → Article 16-1 alinéa 3 du code civil: le corps humain ou ses éléments « ne peuvent faire l'objet de droits patrimoniaux »

      Clientèles civiles: La clientèle civile est constituée par l'ensemble des individus qui sont en relation avec un membre d'une profession libérale pour recourir à ses services. 

      Au terme d'une jurisprudence fondée sur l'article 1128 du code civil, cette clientèle était jugée hors commerce, et ne pouvait faire l'objet d'une cession au profit d'un confrère. Mais le droit de présenter un successeur constituait en revanche un droit patrimonial qui pouvait être objet de la convention: Civ. 1Ère, 7 juin 1995

      La solution a été dénoncée par la doctrine comme peu cohérente. La cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence par une décision du 7 novembre 2000 admettant la validité d'un contrat de cession de clientèle civile. Elle a toutefois subordonné cette validité à la condition essentielle que la liberté de choix du patient soit préservée lors de la cession, celui-ci devant être totalement libre de consulter ou non le successeur. 

    • Objet conforme à l'ordre public et aux bonnes moeurs: L'article 6 du code civil interdit de déroger par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs. 

 

Conformité de l'objet à l'ordre public: L'ordre public est défini comme la « norme impérative dont les individus ne peuvent s'écarter ni dans leur comportement, ni dans leurs conventions ». 

Le concept renvoie à l'idée d'une hiérarchie de valeurs, certaines règles étant jugées si essentielles à l'intérêt général qu'aucune convention ne peut y déroger. Si l'objet du contrat est contraire à l'ordre public, sa nullité absolue est donc prononcée par le juge

Source de l'ordre public: Une disposition d'ordre public est le plus souvent imposée par la loi, mais il est depuis longtemps admis que le juge dispose aussi d'un pouvoir de définition à l'ordre public, ce dernier étant qualifié de virtuel: Civ, 4 décembre 1929. 

Contenu de l'ordre public: Son contenu est évolutif puisqu'il est lié aux valeurs d'une société et variables selon les époques. 

On oppose traditionnellement deux sortes d'ordre public:

  1. L'ordre public classique, politique: vise à protéger les valeurs essentielles de la sociétés relatives à l'Etat et à la famille. 
  2. L'ordre public économique: vise à défendre d'autres valeurs liées à l'économie. 

    On distingue:

    → l'ordre public de direction: par lequel l'Etat tente d'imposer à la société des règles nécessaires à la régulation économique: contrôle des prix, des changes, de la concurrence. 

    → l'ordre public de protection: qui permet par l'intermédiaire de dispositions impératives, d'assurer la sauvegarde de certaines catégories de citoyens ou d'intérêts appelant une sollicitude particulière de l'Etat. 

    Exemple: mouvement de protection du consommateur, de l'assuré ou du salarié. 

 

Conformité de l'objet aux bonnes moeurs: Le contrat doit avoir un objet conforme aux bonnes moeurs. Cette notion renvoie à une morale collective, morale du plus grand nombre, orientée essentiellement vers la sphère sexuelle. 

→ L'équilibre de l'objet: Aucun texte de portée générale n'exige dans le code civil, un équilibre économique du contrat. Une telle absence serait toutefois contraire à la liberté des parties et source d'une grande insécurité juridique.

 

La sanction du déséquilibre des prestations: la lésion:

La lésion est le déséquilibre des prestations contractuelles existant au moment de la formation du contrat. Elle est source d'un défaut d'équivalence entre les objets des obligations réciproques, causant un préjudice économique à l'une des parties. 

Le code civil n'imposant pas de façon générale, le concept de juste prix, la lésion n'est sanctionnée que de manière exceptionnelle.

De part sa définition, la lésion ne peut exister que dans les contrats onéreux et commutatifs.  Elle est donc exclue dans les contrats aléatoires: l'aléa chasse la lésion. 

 

Cas de lésions prévus par le code civil: Au terme de l'article 1118 du code civil« la lésion ne vicie les conventions que dans certains contrats ou à l'égard de certaines personnes ». 

  • « A l'égard de certains contrats »: Dans le code civil, la lésion est prise en compte dans deux hypothèses:

    • la lésion de plus des 7/12ème subie par le vendeur

    • le partage: article 889 du code civil, qui depuis la loi du 23 juin 2006, ne donne plus lieu à rescision en cas de lésion de plus d'1/4 au détriment d'un copartageant, mais seulement à une action en complément de prix. 

  • « A l'égard de certaines personnes »: Tel est le cas dans le droit des incapacités, au profit du mineur ou du majeur incapable.

 

Cas de lésions postérieurs au code civil: Certaines lois postérieures ont étendu le domaine de la lésion. 

Exemples:

Dans les ventes d'engrais: lésion de plus d'1/4 au détriment de l'acheteur. 

Dans le domaine de la propriété littéraire et artistique: lésion de plus des 7/12ème au détriment de l'auteur. 

 

Les caractères de la lésion: La lésion présente deux caractères communs: 

    • Un caractère restrictif: La jurisprudence refuse de sanctionner la lésion en dehors des hypothèses prévues par la loi. 

      Exception: honoraires des mandataires ou des professions libérales. Depuis 1987, la Cour de Cassation reconnaît aux juges du fond un pouvoir de réduction des honoraires excessifs, récemment étendu aux cas où un accord était préalablement intervenu sur leur montant avec le client: Civ., 29 janvier 1867. Aucun fondement textuel ne soutient cette jurisprudence constante, les tribunaux ne se référant pas aux règles de la lésion. Mais ils parviennent à un résultat équivalent en sanctionnant un déséquilibre financier du contrat, en dehors de tout fondement légal. 

    • Un caractère objectif de la lésion: La jurisprudence affirme qu'il s'agit d'un vice purement objectif. La seule preuve du déséquilibre entre les prestations, telle que requise par le texte applicable, suffit à mettre en oeuvre la sanction. La preuve d'un vice de la volonté est inutile et indifférente. 

 

Sanctions de la lésion: La sanction est la rescision, soit la nullité de l'acte lésionnaire. La preuve du déséquilibre doit être apportée par le demandeur de l'action, soit la victime de la lésion. Elle est en principe libre, mais dans la vente, l'article 1678 du code civil exige une preuve rapportée par trois experts. 

Le juge apprécie la lésion au moment de la formation du contrat.

Le prononcé de la rescision peut être évité si la partie adverse accepte de verser le supplément de prix correspondant au « juste prix » de la chose. Dans la vente, cette possibilité est prévue à l'article 1681 du code civil.

 

  • La sanction du déséquilibre des clauses du contrat: les clauses abusives:

    L'équilibre de l'objet des obligations n'était envisagé qu'au regard du contrat dans son entier, et non au regard des clauses de ce dernier. 

Mais à partir de 1970, est apparue l'idée qu'une inégalité pouvait aussi naître de l'existence de certaines clauses, qui octroyant des prérogatives excessives à l'une des parties, entraînent un égal déséquilibre de la convention. Réglementées par une loi du 10 janvier 1978 modifiée en 1995, les clauses abusives font aujourd'hui l'objet des articles L 132-1 et suivants du code de la consommation. 

 

Le domaine de protection: L'article 132-1 du code de la consommation circonscrit la protection contre les clauses abusives d'un double point de vue:

  • Quant aux personnes protégées: seul bénéficie d'une protection le consommateur ou le non-professionnel contractant avant un professionnel. 
  • Quant aux clauses: Le code de la consommation définit la clause abusive comme celle ayant « pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ». La clause abusive se caractérise par un critère purement objectif: le déséquilibre significatif induit au sein de la convention. Pour l'apprécier, le juge doit raisonner par rapport à l'économie générale du contrat, en se plaçant au jour de la conclusion: article L132-1 alinéa 5 du code de la consommation. 

    Si ces deux critères sont réunis, la clause peut être considérée comme abusive quel que soit le type de contrat, la protection n'étant pas limitée aux contrats d'adhésion, même si ceux-ci demeurent son domaine d'élection. 

 

Les modes de protection:

La clause abusive est selon le code de la consommation, réputée non écrite c'est à dire annulée, sans que la validité du contrat ne soit par ailleurs affectée. 

Mais pour parvenir à un tel résultat, deux voies peuvent être utilisées:

  • La clause déclarée abusive par décret: Procédure de principe. Un décrit pris en Conseil d'Etat, après avis de la commission des clauses abusives, détermine des types de clauses qui doivent être regardées comme abusives au sens de la loi. Celles-ci doivent alors être retirées des contrats où elles figurent. 

A défaut, le juge saisi les déclare non écrites, sans avoir à apprécier leur caractère abusif. 

Mais depuis 1978, un seul texte de portée générale a été publié, figurant aujourd'hui aux articles R 132-1 et suivants du code de la consommation. Il a été complété par un décret du 25 novembre 2005, codifié sous l'article R132-2-1 du code de la consommation, qui concerne les seuls contrats portant sur les services financiers. La jurisprudence a dès lors réagi à cette relative inaction, en se reconnaissant un pouvoir autonome de déclarer une clause abusive. 

 

  • La clause déclarée abusive par le juge: La cour de cassation dans un arrêt du 14 mai 1991 s'est octroyée le pouvoir de déclarer une clause abusive. 

    Désormais, le juge peut annuler une clause abusive sur la seule base des critères énumérés par le texte de loi, même si aucun décret n'est intervenu en ce sens. 

    La solution a cependant été implicitement entérinée par le législateur en 1995. 

    Le juge apprécie la clause afin de savoir si elle crée un déséquilibre significatif au sein du contrat. Mais, la décision n'ayant qu'une autorité relative de chose jugée, elle ne s'impose pas à une autre juridiction saisie d'une clause identique

 

 

II. LA CAUSE

Visée par les articles 1108 et suivants du code civil, la cause peut être définie comme la raison d'être de l'engagement des contractants. C'est la réponse à la question « pourquoi est-il dû?», révélant que le contrat est toujours conclu dans un but donné, assise de la volonté des parties. 

Lorsqu'on s'interroge sur le pourquoi de l'engagement des parties deux réponses peuvent être apportées:

  • on peut s'intéresser à la raison d'être abstraite de l'engagement: la cause objective.

  • on peut s'intéresser aux mobiles concrets ayant poussé les parties à contracter: la cause subjective.

 

→ La cause objective: appelée cause abstraite ou cause de l'obligation. Cette cause est utilisée dans les hypothèses d'absence de cause.

La cause objective est « le but immédiat et direct qui conduit le débiteur à s'engager ». Il s'agit d'une cause abstraite car la recherche ne porte pas sur les considérations subjectives ayant motivé les parties mais sur la raison d'être générale de leur engagement. C'est la réponse à la question: « pourquoi le débiteur exécute-t-il son obligation? ». Elle est toujours la même pour une même catégorie de contrat. 

  • Contrats synallagmatiques consensuels: la cause de l'obligation d'une partie est l'objet de l'obligation de l'autre, expression de l'interdépendance des obligations.

    Ainsi dans la vente, l'objet de l'obligation de l'acheteur est le paiement du prix, celui du vendeur la livraison de la chose. Chacune des obligations se servant mutuellement de cause, la cause de l'obligation du vendeur est le paiement du prix par l'acheteur. La cause de l'obligation de l'acheteur est la livraison de la chose par le vendeur. 

    Dans le bail, la cause de l'obligation du bailleur est le paiement du loyer. Celle du locataire est la mise à disposition de la chose louée. 

  • Contrats synallagmatiques aléatoires: L'identification de la cause est plus délicate puisque l'objet des prestations est incertain. La jurisprudence considère que la cause est l'aléa. 

  • Contrats réels: La cause est la remise de la chose. 

    Ainsi dans le dépôt la cause de l'obligation de conservation du dépositaire est la remise de l'objet. Une telle identification de la cause peut surprendre car la remise de la chose est aussi la forme requise à peine de nullité. 

  • Contrats à titre gratuit: La principale application est la donation. La cause est ici l'intention libérale. Elle semble se confondre avec les motifs, et à certains égards, avec le consentement. 

 

Utilité de la notion: sanction de l'absence de cause:

Article 1131 du code civil: « l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause (...) ne peut avoir aucun effet ». Dès lors si l'une des obligations est dépourvue de cause, le contrat peut être annulé. Mais si il faut que la preuve de cette absence soit apportée. 

 

  • L'absence de cause: La sanction de l'absence de cause de l'obligation permet au juge d'opérer un contrôle de l'équilibre de la convention, et ne concerne que les contrats à titre onéreux.

    Deux conditions sont nécessaires: L'absence de cause de l'obligation et l'absence totale de cause. 

     

  • L'absence de cause de l'obligation: L'article 1131 du code civil permet d'annuler un contrat lorsque la cause de l'obligation fait défaut. Exemples: vente dépourvue de prix / bail sans loyer. 

Absence de cause et contrat de révélation de succession: un généalogiste propose à un héritier de l'informer de l'existence d'une succession dans laquelle il a des droits, moyennant une quote-part de cette dernière. La jurisprudence considère que l'obligation de rémunération de ce dernier est nulle pour défaut de cause: Civ., 1er, 18 avril 1953

Absence de cause et contrat de prêt: L'emprunteur ne pouvait traditionnellement arguer de la nullité de l'emprunt pour absence de cause lorsque la vente en considération de laquelle l'emprunt avait été fait n'avait pas eu lieu. « La cause de l'obligation de l'emprunteur résidait dans la mise à disposition des fonds nécessaires à l'acquisition » et son existence n'est donc pas affectée par des événements ultérieurs: Civ., 1ère 20 novembre 1974, sauf circonstances particulières: Civ., 1ère, 1 juillet 1997. (retenant l'existante d'une cause unique entre les contrats de vente et de prêt conclus le même jour et considérés comme étroitement liés par les parties.)

Absence de cause et stipulations contractuelles excessives: La jurisprudence utilise également la notion d'absence de cause pour annuler des stipulations contractuelles excessives. 

Exemple: arrêt chronopost, chambre commerciale du 22 octobre 1996. La cour de cassation annule une clause exonératoire de responsabilité portant sur l'obligation essentielle du contrat, sur le fondement de l'article 1131 du code civil. 

 

  • L'absence totale de cause: La nullité du contrat ne peut en principe être prononcée que si la cause de l'obligation fait totalement défaut. 

    La cour de cassation refuse traditionnellement d'annuler une convention dont le prix était faible mais non dérisoire: Civ., 1ere, 4 juillet 1995

     

    Certaines décisions de jurisprudence opèrent par le biais de la cause, un rééquilibrage plus large de l'économie du contrat par deux biais:

    • infléchir la notion traditionnelle de cause objective en déterminant cette dernière par référence à « l'économie du contrat voulue par les parties », permettant de sanctionner un déséquilibre structurel du contrat sur le fondement de l'article 1131 du code civil: Civ., 1ere, 3 juillet 1996.

       

    • la prise en compte de la fausseté partielle de la cause. La cour de cassation a pu considérer dans un arrêt du 11 mars 2003 que l'absence partielle de cause devait être sanctionnée par la réduction de l'acte « à la mesure de la fraction subsistante ». Cette décision conférait au juge un réel contrôle de proportionnalité de la convention, et donc de l'économie du contrat. 

       

      Mais son champ a été restreint par une décision postérieur du 31 mai 2007 qui a limité cette solution au contrat ou acte unilatéral, rappelant que « dans un contrat synallagmatique, la fausseté partielle de la cause ne peut entraîner la réduction de l'obligation. » La sanction de l'absence partielle de cause paraît donc pour l'heure évincée dans la plupart des hypothèses

 

  • La preuve de l'absence de cause: Selon l'article 1132 du code civil « la convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée ». C'est à la personne qui se prévaut de l'absence de cause ou de fausseté d'en apporter la preuve: Civ., 1ère, 1 octobre 1986. S'agissant d'un fait, cette dernière peut être établie par tout moyen.

     

→ La cause subjective: La cause subjective dite « cause du contrat ou motif déterminant » est un visée à l'article 1133 du code civil. Elle peut se définir comme le motif déterminant ayant poussé le débiteur à s'engager. Il s'agit ici d'une recherche des mobiles des parties, apportant une réponse à question: « pourquoi le contractant a-t-il conclu le contrat? ». 

Liée étroitement à la psychologie des parties, la cause subjective n'est jamais la même selon les contrats et les personnes. 

Seul le motif déterminant doit être qualifiée de cause. Seul est pris en compte par le droit au titre de la cause le motif impulsif et déterminant ayant poussé la partie à contracter. Les juges doivent en principe opérer une sélection entre les différents mobiles, pour isoler celui sans lequel la partie n'aurait conclu le contrat. 

La cour de cassation dans un arrêt du 7 octobre 1998 est venue affirmer qu'« un contrat peut être annulé pour cause illicite ou immorale, même lorsque l'une des parties n'a peu connaissance du caractère illicite ou immoral du motif déterminant du contrat ».

Utilité de la notion: contrôle de la conformité de la cause à l'ordre public et aux bonnes moeurs: l'article 1133 du code civil pose l'exigence d'une conformité de la cause à l'ordre public et aux bonnes moeurs. Elle permet donc de contrôler la concordance du contrat à des exigences supérieures, dans des hypothèses où le seul recours à l'objet ne le permettrait pas. 

Tel est le cas chaque fois que l'illicéité de l'une des parties ne révèle, non dans la matière de ses engagements, mais dans le but poursuivi. 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :